Le président George W. BUSH reçoit le premier ministre irakien Nouri Kamal AL- MALIKI et plusieurs de ses ministres (notamment les responsables du pétrole et de l'électricité) avec lesquels il s'entretient des voies de la stabilisation et de la reconstruction de l'Irak . C'est la seconde fois que MM. BUSH et AL-MALIKI se rencontrent depuis l'investiture du nouveau gouvernement par le Conseil des Représentants (20 mai) et après la visite surprise du premier à Bagdad le 13 juin. Outre un entretien avec M. BUSH à la Maison-Blanche le 25 juillet, M. MALIKI doit discourir devant une session conjointe du Congrès le 26 juillet.
M. BUSH réaffirme d'abord le soutien des Etats-Unis au nouveau gouvernement permanent souverain de la République d'Irak et rappelle qu'il est dans "l'intérêt national" des Etats-Unis que le cabinet de M. AL-MALIKI réussisse (George W. BUSH, President Bush and Prime Minister Maliki of Iraq Participate in Press Availability, 25 juillet 2006).
La principale thématique ensuite abordée est celle des sources (insurgée, terroriste et intercommunautaire) de l'insécurité persistante alors que la violence entre communautés ethno-confessionnelles augmente en général -- à Bagdad en particulier en dépit du lancement le 14 juin 2006 de l'opération "en avant ensemble" (Amaliya Ma'an ila Al-Amam), opération conjointe américano-irakienne de contre-insurrection/terrorisme et d'aide humanitaire mobilisant dans la capitale 26 000 militaires et 23 000 policiers irakiens ainsi que 7 200 militaires de la Force Multinationale en Irak officiellement en vue de "restaurer la sécurité et l'Etat de droit": multiplication des checkpoints, couvre-feu de 21h à 6h et application stricte de l'interdiction du port d'arme (WHITE HOUSE, Background by a Senior Administration Official on Iraqi Prime Minister Maliki's Visit, 21 juillet 2006). Les résultats initiaux de l'opération "en avant ensemble" sont qualifiés de "décevants" par les parties.
La stratégie générale militaire consiste principalement à "demeurer sur l'offensive". Alors qu'ils privilégiaient le retranchement dans des bases fortifiées périurbaines (bunkérisation) aux dépens de l'investissement dans des avant-postes ouverts urbains (projection) depuis que les troupes américaines s'étaient désengagées de la capitale en décembre 2005, les Etats-Unis planifient désormais de repositionner des troupes américaines en provenance d'autres gouvernorats irakiens (et de la réserve stationnée au Koweït) dans Bagdad et ses périphéries (quatre compagnies de police militaire -- 400 hommes -- pour l'encadrement des unités de police irakiennes, un escadron de cavalerie et un bataillon de troupes d'artillerie) tout en accélérant le transfert de la responsabilité du maintien de l'ordre public des troupes de la Force Multinationale en Irak aux forces de sécurité irakiennes (notamment les forces de police nationales ou locales). Le gouvernement irakien prévoit également de rediriger deux brigades vers la capitale. Au total, 8 000 militaires supplémentaires doivent être repositionnés dans la capitale épicentre des violences afin d'y conduire une stratégie de contre-insurrection "quartier par quartier" dite de la tâche d'huile (sécuriser une zone avant de pacifier graduellement ses périphéries). Il ne s'agirait pas pour autant pour MM. BUSH et AL-MALIKI d'un contretemps mais d'une "phase II" de l'opération "en avant ensemble" selon Stephen J. HADLEY, conseiller pour la sécurité nationale (Stephen J. HADLEY, Press Briefing on Visit of Iraqi President, 25 juillet 2006).
Certes, MM. BUSH et AL-MALIKI s'efforcent de souligner les progrès réalisés depuis l'investiture formelle du nouveau gouvernement permanent souverain d'Irak (20 mai):
- d'abord la présentation formelle du Plan de Réconciliation Nationale par M. AL-MALIKI au Conseil des Représentants le 25 juin
- ensuite le communiqué de l'ayatollah Ali AL-SISTANI exhortant les Irakiens à la solidarité entre communautés ethno-confessionnelles le 20 juillet
- puis l'assouplissement en cours de l'Ordre n°1 de l'Autorité Provisoire de la Coalition en date du 16 mai 2003 (dé-baassification de la société civile) visant à passer d'un processus politique à un processus judiciaire afin de permettre la re-baassification partielle du tissu sociopolitique
- également l'augmentation de la production pétrolière (environ 2,5 millions de barils de pétrole/jour)
- enfin différentes campagnes du gouvernement -- de la lutte contre la corruption à la promotion du dialogue entre communautés ethno-confessionnelles
Ils insistent aussi sur plusieurs initiatives ayant vocation à sécuriser le processus de stabilisation et de reconstruction irakien:
- une Commission Conjointe pour l'Autonomie Irakienne
- ou encore une Convention Internationale pour l'Irak qui devrait être signée en 2006 (le gouvernement irakien s'engagerait à mettre en oeuvre certaines réformes économiques que la communauté internationale finance)
Il n'en reste pas moins des irritants bilatéraux -- de faible intensité car souvent déterminés chez M. AL-MALIKI par des impératifs de politique intérieure (notamment le besoin d'agréger et d'articuler certaines demandes sociopolitiques dont le leader chiite Moqtadar AL-SADR se fait le porte-parole). Notamment, M. AL-MALIKI:
- demande que les militaires américains puissent être poursuivis devant les juridictions pénales irakiennes pour des actes commis sur le territoire de la République d'Irak
- critique l'opération militaire israélienne contre le Liban (opération "juste récompense") après que le Conseil des Représentants l'a qualifié d''agression criminelle" -- soutenant tacitement le gouvernement iranien et sa force quasi-déléguée du Hezbollah
- et pose le préalable du cessez-le-feu "immédiat" au traitement des causes profondes du conflit armé en vue de la solution politique "durable" recherchée par M. BUSH
Le président BUSH insiste à nouveau sur le fait que la décision de retirer les troupes américaines mobilisées sur le théâtre d'opérations irakien sera déterminée par la situation militaro-sécuritaire concrète sur le terrain telle qu'évaluée par les responsables militaires -- au premier rang desquels le commandant des forces américaines en Irak, le général George W. CASEY.