Le secrétaire d'Etat Condoleezza RICE participe au 13ème Forum Régional de l'ASEAN (ARF pour ASEAN -- Association of South East Asiatic Nations -- Regional Forum) qui se tient à Kuala Lumpur (Malaisie) les 27-8 juillet 2006 et vise principalement cette année à convaincre la Corée du nord de réintégrer les Six-Party Talks (SPT) portant sur son programme nucléaire. Lors de la première participation de Mme RICE à l'ARF et alors que la présence imprévue du ministre iranien des Affaires étrangères (Manouchehr MOTTAKI) est annoncée, la crise israélo-libano-palestinienne et la problématique du programme nucléaire iranien sont également abordées.
Enceinte de dialogue multilatéral sur les problématiques de sécurité de la zone Asie-Pacifique créée en 1994 dans le cadre préexistant de l'ASEAN, l'ARF réunit au total les ministres des Affaires étrangères de 25 pays:
- les ministres des Affaires étrangères des 10 pays membres de l'ASEAN (Brunei, Cambodge, Indonésie, Laos, Malaisie, Myanmar, Philippines, Singapour, Thaïlande et Vietnam)
- + ceux de l'Australie, du Canada, de la Chine, de la Corée du nord, de la Corée du sud, des Etats-Unis, de l'Inde, du Japon, de la Mongolie, de la Nouvelle-Zélande, du Pakistan, de la Papouasie Nouvelle-Guinée, de la Russie, de Timor-Est et de l'Union européenne
Cette 13ème édition de l'ARF (à laquelle participe le Bangladesh) intervient 13 jours après que les 15 membres du Conseil de sécurité des Nations Unies (CSNU) ont voté à l'unanimité la résolution 1695 (15 juillet), laquelle -- prise sur le fondement juridique du chapitre VI de la Charte des Nations (qui ne prévoit pas l'imposition de sanctions multilatérales, a fortiori le recours à la force armée) conformément à la volonté chinoise (SECURITY COUNCIL, United Nations Security Council Condemns Democratic People's Republic of Korea's Missile Launches, 15 juillet 2006):
- condamne la série de tests sans avertissement de sept missiles couvrant le spectre des portées réalisée par le gouvernement nord-coréen le 4 juillet 2006
- demande aux Etats membres de l'ONU d'empêcher les flux financiers et les transferts de technologies ainsi que de matériels liés aux programmes de missiles et d'armes de destruction massive nord-coréens
- demande au gouvernement nord-coréen de suspendre son programme de missiles balistiques
- demande au gouvernement nord-coréen de s'imposer à nouveau un moratoire sur les tests de missiles à longue portée
- demande au gouvernement nord-coréen de réintégrer sans pré-condition les SPT
Alors que les SPT se trouvaient dans une impasse, la Corée du nord a déclaré en mars 2005 ne plus être liée par le moratoire sur les tests de missiles à longue portée qu'elle s'était imposé le 13 septembre 1999 consécutivement à la crise du 31 août 1998 (un missile Taepodong-1 avait survolé le Japon), puis qu'elle avait confirmé en 2001 et 2002, et a procédé aux tests de plusieurs missiles à courte portée. La série de lancements du 4 juillet 2006 a confirmé la capacité de nuisance potentielle du régime nord-coréen, lequel disposerait des vecteurs de la capacité nucléaire militaire dont il se prévaut sur le papier depuis le 10 février 2005 (aucun test n'a confirmé cette capacité autoproclamée).
Le régime nord-coréen a suspendu en novembre 2005 sa participation aux SPT (visant le démantèlement "complet", "vérifiable" et "irréversible" des programmes et installations nucléaires nord-coréens) consécutivement à l'imposition de sanctions économiques prises par les Etats-Unis en septembre 2005 -- contre une banque (Banco Delta Asia à Macau) et huit entreprises nord-coréennes officiellement accusées de contrefaçon, blanchiment d'argent et trafic de drogue -- et perçues comme visant à l'isoler. Depuis, en dépit de la déclaration conjointe du 19 septembre 2005, la Corée du nord conditionne la reprise des pourparlers au retrait des sanctions tandis que les Etats-Unis maintiennent un découplage entre les SPT et les sanctions économiques, exhortant la puissance nucléaire de facto à renouer sans pré-conditions le fil de la négociation.
Devant le refus de Pyongyang de réintégrer les SPT à l'occasion de l'ARF, les cinq participants restant s'entretiennent en marge du sommet avec l'Australie, le Canada, l'Indonésie, la Malaisie et la Nouvelle-Zélande de la problématique nucléaire nord-coréenne. Si l'assistant du secrétaire d'Etat, Christopher HILL, avertit que la Corée du nord parviendra à "l'isolement" si tel est son souhait, Mme RICE déclare que les Etats-Unis restent prêts à reprendre les pourparlers "à tout moment, où que ce soit et sans [pré]conditions" (Condoleezza RICE, Remarks on Multilateral Talks on North Korea, Kuala Lumpur, Malaisie, 28 juillet 2006).